Les autorités identifient 186 suspects face aux détournement d’aide au Tigré
Les enquêtes ordonnées par les autorités régionales intérimaires du Tigré sur le détournement de l’aide alimentaire dans cette région d’Ethiopie ont identifié 186 suspects, membres du gouvernement et d’organismes humanitaires, selon le chef de la commission d’enquête.
Le 3 mai, l’USAID, l’agence humanitaire du gouvernement américain, et le Programme alimentaire mondial (PAM) des Nations unies ont annoncé la suspension indéfinie de leur aide alimentaire au Tigré en raison des détournements.
Tous deux ont ensuite étendu cette décision à l’ensemble de l’Éthiopie le 8 juin, l’USAID évoquant un détournement « généralisé et coordonné » de l’aide alimentaire à travers le pays.
« Cinq entités, le gouvernement érythréen, le gouvernement fédéral éthiopien, les autorités régionales du Tigré, les coordinateurs des camps de déplacés et les humanitaires, ont participé » à ces détournements, rapporte Tigrai TV, le média officiel des autorités régionales du Tigré, citant un entretien mercredi avec le général Fiseha Kidanu, chef de la commission d’enquête.
« Sept des 186 suspects ont déjà été incarcérés », a déclaré le général Fiseha, sans préciser à quelles entités appartiennent les suspects identifiés.
Entre novembre 2020 et novembre 2022, le Tigré a été le théâtre d’un conflit brutal entre le gouvernement fédéral éthiopien et les autorités régionales qui avaient rejoint la rébellion, au cours duquel la région a été coupée du monde pendant plusieurs mois et privée d’aide humanitaire.
L’armée éthiopienne, ainsi que des forces des régions éthiopiennes voisines, sont intervenues militairement au Tigré pour soutenir l’armée fédérale éthiopienne. Toutes les personnes impliquées dans le conflit ont été accusées de multiples actes de violence.
Le 3 mai, Getachew Reda, président de l’administration régionale intérimaire mise en place à la fin du conflit, a annoncé que, « compte tenu de la gravité du problème et de l’accumulation des preuves », il avait lancé une « enquête pour s’assurer que tous les responsables sont tenus responsables ».
Jeudi, le ministère éthiopien des Affaires étrangères a réitéré qu’une « enquête appropriée sera menée » au niveau national, conformément à « l’accord conclu entre les gouvernements américain et éthiopien » suite à l’annonce de l’USAID.
« Néanmoins, cela n’empêchera pas certaines entités de vouloir utiliser » le détournement de l’aide « comme un outil de pression diplomatique », a expliqué Meles Alem, porte-parole du ministère éthiopien des Affaires étrangères, lors d’un point presse jeudi.
Fin mai, l’agence humanitaire de l’ONU (Ocha) estimait que quelque 20 millions de personnes, soit 16 % des 120 millions d’Éthiopiens, étaient dépendantes de l’aide alimentaire en raison d’un conflit et d’une sécheresse historique dans la Corne de l’Afrique.